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alexandrins

Relis-moi

Publié le

 Je t'aime, je le peux, toi et tes revenants.

Si je connais un peu l'homme de maintenant,

j'ignorais tout de toi, mais de toute façon,

je découvre pantois ce qui, petit garçon,

t'effrayait, te touchait, t'amusait, te veillait,

t'aimait, t'effarouchait, ce qui t'émerveillait.

C'est mon amour qui mue au fil de tous ces liens.

J'ai été très ému d'être parmi les tiens.

J'ai eu le cœur serré, le cœur en noir et blanc,

quand tu as déterré, on ne fait plus semblant,

ces photos du passé où je t'ai vu enfant,

les nuages chassés, le soleil triomphant.

Que l'on m'exclut après, c'est mon âme qu'on pince !

Ta mère m'a montré les portraits de son prince

qui est le mien aujourd'hui, qui le sera toujours.

Tout mes mots sont pour lui, plus faibles que l'amour

qui sait les animer et qui me les inspire.

Ce n'est que pour t'aimer que ma bouche respire.

Ton village et ton bois, ta maison et ta rue,

tout fait partie de moi. Tout revient et se rue

à mon bon souvenir et à ma propre enfance.

Je veux que l'avenir assure ma défense.

J'ai aimé tes parents, leurs chiens et leurs chevaux.

Tu dis que c'est marrant. Sais-tu ce que ça vaut ?

J'ai été bouleversé de voir ton univers.

En moi tu as versé du soleil en hiver.

Privilégié je suis quand tu te déshabilles,

que chez toi je te suis, reçu par ta famille.

Tu me montres tes lieux, m'invites à ton chevet,

me présentes à ton dieu, le rideau s'est levé,

tu me fais visiter, sous l'ardoise et la craie,

toutes tes vérités et tes jardins secrets.

Et je crains tout à coup, perdu entre mes lignes

et la corde à mon cou, de ne pas être digne

de l'honneur que tu fais à ton admirateur.

Je ne suis point parfait mais bien ton serviteur.

Pas digne de ton corps, digne de ta confiance ...

Ce n'est pas au décor que mon cœur se fiance.

Ce n'est pas à l'acteur que je voue ma passion,

ni même au séducteur, ni au petit garçon,

c'est à toi tout entier, mon amour et mon ange,

que je veux m'allier sur l'or d'une phalange.

Plus j'explore de toi, plus j'adore le tout.

J'ai dormi sous ton toit, je t'ai rêvé partout.

Si ce n'est de passion, ce n'est pas d'amitié

qu'il peut être question, de bonheur à moitié.

Après toi j'ai couru. Ne dis pas que tu pars.

Le chemin parcouru est un point de départ.

Comment tout cet amour à nos desseins peut nuire,

Quand nous n'avions toujours de cesse de construire ?

J'aimerai le tilleul si j'aime tes cheveux.

J'avance et même seul, j'apprends que je te veux.

Sans toi je ne suis rien, mais ce n'est pas le pire.

Bien des gens ne sont rien. Ce n'est rien de le dire.

Je préfère être tout si ce n'est que pour toi.

Le reste je m'en fous. Garde ma bague au doigt.

Le soleil a ramé. Sur tes bois il a plu.

Je suffoque d'aimer quand on ne m'aime plus.

Ma folie a sévi. Est morte ma démence.

Reviens me donner vie ; je te l'offre en silence.

Je ne t'ai pas roulé dans mes alexandrins.

Sur tes reins ont coulé les aveux de mes drains.

Relis-moi de plus près si vient l'ombre d'un doute

sur ma sincérité et tout ce qu'il m'en coûte.

Dans mes vers essoufflés, je ne t'ai pas menti.

Dans ton verre soufflé, j'ai bu jusqu'à la lie.

Je l'ai écrit cent fois, et tu m'en vois navré :

je n'ai aimé que toi, je ne suis pas sevré.

Je me croyais amant. Ce signifié s'allège.

Quel est ce sentiment qui fait boule de neige ?

Envie de t'enlacer devenue un besoin.

Au lieu de me lasser, je veux aller plus loin.

Quelle est donc cette loi qui fait si peu de bruit.

Je n'ai aimé que toi, mais moins fort qu'aujourd'hui.

Je me surprends vraiment, à chaque jour qui passe,

à vouloir fermement nous sortir de l'impasse.

Car plus je te connais et plus tu m'émerveilles.

Des amours je n'en ai jamais eues de pareilles.

Les insultes tu dois oublier à tout prix.

C'est mon cœur maladroit. C'est mon cœur incompris.

Mon âme kidnappée sombrait dans la torpeur.

M'avais-tu échappé ? De te perdre j'ai peur.

Reviens-moi. Reviens-moi. Je te veux pour toujours.

Je n'ai aimé que toi depuis le premier jour.

Tu sais, j'ai progressé. Je me rallie à tout

ce que j'ai transgressé et je ne suis plus saoul.

Cette folie douce ne fera plus la loi.

Je renonce à tout ce qui m'éloigne de toi.

Je me fous de la baise et de mes décadences.

Je sais combien tu pèses dans la seule balance.

Le bonheur confisqué, je ne suis qu'un forçat.

Je ne peux plus risquer de te perdre pour ça.

J'ai beaucoup avancé, beaucoup appris de toi,

mûri, récompensé, et je suis fier de moi.

Je ne suis plus railleur, ni schizo, ni martien.

Tu m'as rendu meilleur. Un homme je deviens.

Un autre pourrait-il récolter sans effort

le fruit du grain subtil que tu as mis dans mon corps,

te voler les lauriers de ce travail géant,

ramasser les billets de ton jeu bienveillant ?

Des succès séduisants nous avons engrangés.

Pourquoi fuir à présent après m'avoir changé ?

Le but était précis, voulu pour être aimé.

Récolte donc ici ce que tu as semé.

C'est à toi que revient la moisson inouïe

de ce que je deviens, du bonheur dont je jouis.

Pourtant je suis puni. Tu m'as mis au mitard.

Peut-être est-ce fini. Peut-être est-ce trop tard.

Tu peux m'abandonner, tu ne me quittes pas.

Le tocsin peut sonner. Je te suis pas à pas.

Je te donne mon art, mes chansons et mes faits.

Tu es mon étendard. Relis Cause à effet.

Seul ton nom me convient, me sourit et m'enivre.

Tu restes mon seul bien ... Et ma raison de vivre.

Tu me prives de toi. Je suis seul en Salanque.

Je ne pense qu'à toi. Je te veux, tu me manques.

Le soleil a ramé. Sur tes doigts il a plu.

Je suffoque d'aimer quand on ne m'aime plus.

Mon cœur est tout mâché mais il fait du boucan.

Je suis prêt à marcher. La balle est dans ton camp.

Je te donnerai tout ce qu'il reste à donner.

Si j'étais fou et saoul, il faut me pardonner.

Je te donne mon or, mes tangos, mes délires.

Je t'aimerai encor quand restera le pire.

Je te donne mes yeux, je te donne ma peau,

je te donne mes lieues, mon manteau, mon chapeau,

mon piano, mes pensées, mes vers, mes litanies,

mes scènes insensées et mes rêves bannis ...

Prends tout ou je me meurs. Reviens-moi maintenant.

Je t'aime, j'en ai peur, toi et tes revenants.

C'est toi qui avais raison, il faut fuir la passion,

l'effroyable prison, sous pression, sous tension,

le dangereux élan, l'éphémère mirage,

le piège étincelant pris dans l'œil de l'orage.

La nôtre est consommée. L'écume se retire.

Je me suis consumé et mes cendres s'étirent.

Je suis prêt désormais à en porter le deuil.

De notre histoire aimée, je veux franchir le seuil.

La passion est un jeu, la nôtre est achevée.

Notre amour de ce feu pourra-t'il nous sauver ?

Pourra-t'il nous garder et nous faire survivre ?

Pourra-t'il résister, nous amener à suivre ?

Je suis prêt à passer au chapitre suivant.

Oublie donc mon passé pour me rendre vivant.

Tous mes efforts alors, ne seraient que du vent.

A ma phalange l'or ! Donne-moi de l'avant.

Je n'ai aimé que toi. Je n'aimerai que toi.

Mais l'angoisse me broie. Une bague à ton doigt.

Ta mère m'a montré les portraits de son prince.

Que l'on me chasse après, c'est mon cœur que l'on rince.

Je voudrais m'allonger contre toi dans ton lit,

juste dormir, songer, quand tes mains se délient,

une sage étreinte, chaste, tendre et pudique,

la lumière éteinte, pour que nos chairs s'appliquent.

Echec et mat. Capot. Hyde s'est fait la paire.

Je n'ai plus que ta peau. Je n'ai d'autres repères.

Tant pis pour le plaisir. Tu es seul maître à bord.

Le corps et le désir se résument à ton corps.

Je voudrais te sentir, du bout de mes fleurets,

de mes doigts, consentir à juste t'effleurer,

à tes fleurs me pâmer, éclore et m'effeuiller,

recueillir à jamais, tes lilas, tes œillets ...

Ta nature est en moi. C'est moi qu'elle fait bouillir.

C'est toi qui as le choix. Relis Tu peux vieillir.

Pour quoi donc suis-je fait, suis-je venu au monde,

pour quel ordre parfait, pour quelle lune ronde ?

Saurais-je donc jamais quel destin j'ai gagné ...

Je suis là pour t'aimer. Je veux t'accompagner.

Si j'ai tout exploré, je sais que mon cœur bat,

que c'est pour t'adorer que je vis ici-bas.

Tous les mots que je couve ne seront massacrés.

Ils se lèvent et te prouvent qu'ils te sont consacrés.

Si tu les trouves plats, alors tu m'assassines.

Bien sûr, je ne suis pas ni Hugo ni Racine.

Mais je mets tout mon poids, le feu et l'énergie,

mon espoir et ma foi, la fougue qui surgit,

ma force décuplée, dans ces lignes signées

pour te voir s'il te plaît, touché, ému, soigné,

pour te porter très haut et tes voiles gonfler,

ou t'apporter de l'eau, dans tes bronches souffler,

te rendre doux et fier, éclairer ton visage,

te donner de ma chair, te donner du courage.

Si tu doutes de toi, lis mon amour en moi.

Je t'aimerai deux fois. Accorde-moi le droit.

Le soleil est mon choix. C'est ailleurs qu'il a plu.

Je t'aimerai pour toi si tu ne t'aimes plus.

Je me ferai catho, hébreu ou anglican.

Je suis mon seul cadeau. La balle est dans ton camp.

De Province on rentrait dans la même voiture

et mes regrets entraient dans cette conjoncture.

Je suis reçu, promu, chez toi ... ça me revient.

J'ai été très ému d'être parmi les tiens.

J'ignorais tout de toi, mais de toute façon,

j'aimais autant le roi que le petit garçon.

Mes larmes ont perlé à l'intérieur blessé.

Je ne pouvais parler de peur de t'agacer.

Alors mon désespoir a dû rester pantois.

Mais tu dois le savoir : je n'attendrai que toi.

N'accepte mon discours que s'il ne te dérange.

Je mets tout mon amour dans l'or à ta phalange. 

 

Philippe LATGER
Août 2002 à Perpignan

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Le soleil en moi

Publié le

Pour toi qui es parti à l'autre bout du monde,

le soleil est sorti, pour que la glace fonde.

Le feu du sentiment ne craint pas la distance.

En moi voici l'amant qui entre en résistance.

J'ai hissé sur mon toit le pli de ton drapeau.

J'ai gardé avec moi la chaleur de ta peau.

Tu as pris cet avion pour monter à cheval,

assouvir ta passion, ce rôle médiéval,

pour tourner au Québec et gagner du terrain.

Tu vois, mes yeux sont secs et mon cœur est serein.

Bien sûr, tu n'es pas là. Je te cherche partout.

Bien sûr, tu es là-bas. Mais je t'ai à mon cou.

A mon sang, à mon corps, reste ton empreinte.

Sur la corde et l'accord, vibrent nos étreintes.

Si mon lit est trop grand, j'ai toujours ton parfum :

il est gravé dedans, loin des vices défunts.

Je ne croirai jamais au bonheur défendu.

Je t'ai toujours aimé, et toujours attendu.

Feu la Plaza Real. Barcelone est quittée.

Tu es à Montréal, cette étrange cité,

où j'ai laissé de moi, des pans de mon passé

et des frères siamois, des espoirs fracassés.

Tu es sur ce rocher impassible aux torrents,

qui est resté couché sur l'eau du St-Laurent,

sur lequel il neigeait des besoins, des envies,

qui a su me protéger des foudres de la vie.

Sur mes terres tu es, mes arpents de coton,

sous le bleu des nuées et le jazz de Boston.

L'été vient à poindre. Mon amour impuni.

Je veux vous rejoindre. Toi et ma ville unis.

Je sais que je viendrai à l'aube vous surprendre.

Ce que j'ai pris de vrai, j'accourrai vous le rendre.

Déjà, je tressaille. Accélérer le temps.

Doubles retrouvailles. Au Diable le Printemps !

Si j'ai su ramener un peu de Montréal

sur la mer surmenée, comme un enfant loyal,

dans mes cartons crevés et de pleines valises

de souvenirs rêvés, de vœux qu'on réalise,

à la case départ, à ma terre natale,

c'est qu'il n'y a pas d'écarts entre les eaux vitales.

Montréal est en moi, où que je sois au monde,

envahissant l'endroit, jusqu'aux brèches profondes.

De la même façon, tu m'habites toujours.

L'objet de ma passion est à l'ordre du jour.

Mon corps est irisé de tes propres couleurs.

Tu m'as vampirisé, sans mal et sans douleurs.

Tu es le grain de l'air qui roule avec aisance.

Dans ma fibre et ma chair, je ressens ta présence.

Je suis tout plein de toi. Ton image m'inonde.

Le soleil est en moi... A dans quelques secondes !

 

Philippe LATGER
Mai 2002 à Perpignan

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Cause à effets

Publié le

Ce n'est pas de vieillir qui me cause souci
mais de ne plus bouillir sous tes mains adoucies.
La rousseur de ton front, la chaleur de tes yeux,
m'irradient au profond de mes rires anxieux.

Ce n'est pas de mourir qui me cause du tort,
de voir ma chair pourrir quand ma bouche se tord,
ni la voie écrémée du temps qu'on découdrait,
mais de ne plus t'aimer comme je le voudrais.

Ce n'est pas le poison qui me cause la nuit,
à travers mes cloisons, le pire des ennuis.
J'ai noyé le poisson, mes bateaux sabotés.
J'ai vomi la boisson, le prix de la beauté.

Ce n'est pas le passé qui me cause à effets.
Les affaires classées. Ce qui est fait est fait.
La vieillesse est un jeu. Un coup sempiternel.
Tu es mon seul enjeu, enjoué, éternel.

Ce n'est pas de faner qui me cause tourment,
pleurer sur les années où j'étais jeune amant,
mais de ne plus pouvoir être encore le tien,
de ne plus t'émouvoir et de n'être plus rien.

Ce n'est pas de croupir qui me cause folie.
La Mort peut s'accroupir dans le creux de mon lit.
Sur mon corps atrophié, elle peut faucher des mois.
Je veux bien la défier si tu restes avec moi.

Ce n'est pas le miroir qui me cause ce soir,
ce teint de désespoir qui reflète le noir
de mon âme blessée, ma vie rasée de près,
les images tressées de l'avant et l'après.

Réfléchie dans le vent, ma jeunesse pendue,
me rattrape souvent, à mon cou suspendue.
Que m'importe le temps si tu dois l'arrêter.
Je payerai content, le rendu, le prêté.

Ce n'est pas de souffrir qui me cause tracas.
La terre peut s'ouvrir dans d'horribles fracas.
Je veux juste t'avoir et être à la hauteur.
Peur de ne pas savoir, d'enrayer le moteur.

Je ne crains pas le pli de ma peau décatie,
ni l'acte inaccompli, l'oubli de l'empathie.
Empâté à loisir, saurai-je alors vraiment
suffire à tes désirs et être un bon amant ?

Voudras-tu me cueillir avec tes doigts de fée ?
Ce n'est pas de vieillir qui me cause en effet,
la pire des frayeurs, le pire des soucis,
le pire et le meilleur, quand tout sent le roussi.

Ce n'est pas d'oublier qui me cause folie,
le grain du sablier, récolté dans mon lit,
les problèmes semés, l'amour les résoudrait,
mais de ne plus t'aimer comme je le voudrais.

Ce n'est pas de mourir qui me cause à effets
la peur de voir courir les aiguilles griffées
sur mon fil entamé, la vie en découdrait,
mais de ne plus t'aimer comme tu le voudrais.

 

Philippe LATGER 2002

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Mea Culpa

Publié le

Je ne veux pas te nier, ou te faire souffrir,

te jeter au panier, laisser la fin s'ouvrir.

Je ne veux pas partir, rendre le tablier,

subir tous les martyres, ni même t'oublier.

Pardonne-moi, mon cœur, si j'ai perdu le fil.

Il n'y a pas de rancœur. Mon furetage est vil.

Je m'inquiète de tout, et j'ai honte de moi.

Je vois le mal partout, y compris dans mes doigts.

Tu m'as tant apporté, d'amour et d'émotions,

que j'ai dû reporter mon autodestruction.

Tu m'as sauvé la vie, tu me sauves de tout.

Mon angoisse a sévi, je suis devenu fou.

Ne tiens pas compte ici de mes égarements.

Je veux aimer aussi et rester ton amant.

Je devrais mieux mâcher avant de digérer.

J'ai peur de tout gâcher, de pas savoir gérer.

Des vagues de questions ont déferlé sur moi.

Aucune déviation ne cache mon émoi.

Sais-tu si de mes peurs, je serai acquitté ?

Même dans mes torpeurs, je ne peux te quitter.

 

Philippe LATGER
Janvier 2002 à Toulouse

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Le fils prodigue

Publié le

Il a perdu sa mère et des amours polies.

Il a pleuré la mer, invoqué la folie.

Du destin affranchi, il dénoua les liens.

L'Atlantique franchie, il regretta les siens.

A New York arrivé, de Montréal parti,

se laissant dériver, pour le temps imparti,

il cherchait le ressort de son propre destin.

Il maudissait le sort, le vin de ses festins.

Des liasses de dollars laissées sur les comptoirs,

crachées comme mollards lâchés sur le trottoir,

son verre remplissaient, d'alcool et de désirs.

Il buvait puis pissait sa honte du plaisir.

L'ivresse et l'abandon étaient son quotidien,

vomissant le pardon sous d'autres méridiens.

Les escortes payées pour ébranler son lit,

les amants balayés, noyés dans sa chienlit,

les rares prétendants, les amoureux transis,

ont tous été perdants de Brooklyn à Chelsea.

Il a traqué l'espoir dans les aéroports,

vanté le désespoir comme ultime support,

source de création et de bonheur tordu,

cour de récréation pour une âme perdue.

Il a cherché l'issue, limousine ou taxi,

la cinquième avenue, son avenir occis.

Il a cherché la mort, le soir, ivre au volant,

les limites du corps, le cœur sanguinolent.

Voulant payer le prix, mais sans gagner sa vie,

il but avec mépris tout le butin ravi,

dépensa sans compter, ni compter sur personne,

ce dans tout le comté, et jusqu'à Barcelone.

 

De son bonheur tari il paraissait comblé.

Il revint à Paris fauché comme les blés.

Il avait tout fumé, tout pris, tout embrassé,

tout brûlé, consommé, tout vu et tout brassé.

Il ne reconnaissait ce qu'il avait osé.

Toute sa vie passée lui donnait la nausée.

On le croyait fini. Il se pensait mauvais.

On le croyait puni. Il se savait sauvé.

Ces impasses voulues, empruntées de surcroît,

furent pour lui, moulu, tout un chemin de croix.

Lavé de ses péchés, il parvint à genoux,

à venir se cacher, dans ses terres, chez nous.

Nous l'avons accueilli, un peu embarrassés.

Il m'a semblé vieilli. Il m'a vu terrassé.

Nous avons fait pour lui ce que nous avons pu.

Il est resté la nuit, guérir sa vie rompue.

Son cynisme brisé vint à s'évaporer

sous le soleil grisé de sa mer adorée :

la fin de la tempête et le ciel pur d'après.

Il redressa la tête et son cœur était prêt.

C'est alors qu'est venu, un ange bienveillant.

Un souffle contenu. Un sourire saillant.

Pas de mauvais bagou, mais de l'effervescence !

Il a repris le goût, il a trouvé le sens.

Ce regard averti a fait fondre sa glace.

Cet amour l'investit et le remplit de grâce.

Son cœur comme fusée, explosa sous mon nez.

Tout le parcours usé, au but l'avait mené.

Au Diable le passé, l'errance et les impasses !

Il faut, j'en sais assez, que jeunesse se passe.

 

Philippe LATGER
Janvier 2002 à Toulouse

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Sept lunes

Publié le

Je n'ai plus de folies. Et je n'ai plus de thunes.
J'ai ouvert grand mon lit pour la septième lune.
Seul mon amour est fou. Je n'ai pas d'autres camps.
Si je ne sais pas où, si je ne sais pas quand,
je sais bien que c'est toi. Je sais bien que c'est nous.
Je le sens dans mes doigts. Je le veux à genoux.
Je n'ai plus de folies. Seul mon cœur m'importune.
Tout le ciel a pâli sous la septième lune.
Si je n'ai plus d'argent, plus riche que jamais,
je regarde les gens et je sais que j'aimais,
que j'aimerai demain et que j'aime aujourd'hui.
Je le vois dans mes mains. Je le lis dans la nuit.
Je n'ai plus de raison, je n'ai plus de fortune.
Je n'ai que ta maison dans la septième lune.
J'ai perdu ma rancœur, le venin, le poison.
Tu me donnes du cœur, éventres mes prisons.
Six mois miraculeux ou un conte de fées.
Le visage anguleux. Un lien plus-que-parfait.
Je n'ai plus un euro, je n'ai plus une thune.
J'ai trouvé le héros sur la septième lune.
Fauché comme les blés, le blé, je l'ai planté,
je me suis attablé aux rêves supplantés,
au désir harponneur. L'argent sent le moisi.
Du fric ou du bonheur, c'est toi que j'ai choisie.
Si j'avais tout perdu, j'ai trouvé ma fortune :
c'est toi qu'on m'a rendue sous la première lune.
Mes yeux reconnaissants l'ont reconnu à temps.
De cerceaux en croissants, l'astre est un cœur battant.
Sur mon œil imprimé, il éclaire les dunes.
Je vais tout arrimer à ma septième lune.



Philippe LATGER
Décembre 2001 à Toulouse

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Valeur ajoutée

Publié le

Rien ne vaut d'être aimé, adulé et chéri.
Que veut dire jamais quand le cœur est guéri ?
Coups de cœur ou coups bas, je n'en regrette aucun.
Rien ne vaut ici-bas de trembler pour quelqu'un.
Chair de poule soudain, quand j'entends son prénom.
C'est un coup de gourdin, pour un oui, pour un non.
C'est un coup de couteau, la foudre sur mon cœur.
Si l'amour est costaud, on est toujours vainqueur.
Je n'ai plus peur de rien. Rien à perdre à présent,
si ce n'est son soutien et mon désir cuisant.
Je lui donnerai tout, toujours, et sans compter,
mon énergie à bout, ma ferveur éhontée.
Rien ne vaut d'embrasser le bonheur sur la bouche,
ne pas s'embarrasser du peignoir sous la douche.
Sans avoir à punir tous ceux de ma tribu,
je peux me démunir de tous mes attributs,
oublier mon passé, ce qui faisait de moi
un homme compassé, mes valeurs et ma foi.
L'amour a dénoué le bandeau sur mes yeux.
Il a su déjouer notre sort insidieux.
Je m'envoûte aux parfums du jasmin, du henné.
Se lier à quelqu'un, ce n'est pas s'aliéner.
C'est reprendre ses droits, trouver sa liberté,
le pouvoir d'être soi, recouvrer sa fierté.
Au-delà des tabous, je vais contre le vent
qui me maintient debout, sait me rendre vivant.
Rien ne vaut la chaleur de ses épaules nues.
Je me ris du malheur, des angoisses connues.
Je me fous du savoir, du succès ou des cieux.
Rien ne vaut de valoir quelque chose à ses yeux.



Philippe LATGER
Décembre 2001 à Toulouse

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Ailleurs

Publié le

Emmène-moi ailleurs, sans attendre la nuit,
dans un monde meilleur où l'on rit de l'ennui.
Mène-moi loin d'ici pour aller droit devant,
sur ton tapis, assis, volant vers le levant.
Dans le vent emportés, sur tes nuages clairs
par le feu escortés, au-dessus des éclairs,
nous saurons affronter l'orage et le désert,
le tonnerre effronté, le vertige des airs.
Emmène-moi là-bas, au-delà des forêts,
des feuilles de tabac, des sapins décorés,
loin des champs de coton, des plaines calcinées,
des troupeaux de moutons, des villes dessinées,
des arbres décimés, des plages mazoutées,
du sang millésimé dans nos veines shootées.
Emporte-moi au loin, dans ces pays lointains
où l'on dort dans le foin jusqu'au petit matin.
Je veux voir le soleil, un océan d'oiseaux,
une lune en vermeil jouer dans les roseaux.
Emmène-moi courir sur la terre adoptée
où je pourrai nourrir des chevaux indomptés,
ce paradis secret où l'on est courageux,
où le sel est sucré, où l'amour est un jeu.
Peux-tu lever les fers d'une vie insultée,
pour aller voir la mer, et rire et exulter !
Mes valises levées seront vites bouclées.
De ton monde rêvé je veux avoir la clé.
Emmène-moi danser dans ta salle de bal.
Devenir fiancés en un rite tribal.
Je veux toucher le ciel, fouiller tous les envers.
Je veux goûter au miel de tous tes univers.
Je veux fuir les hivers, et les cirques glacés,
pour fondre tous mes vers au feu de mon passé.
Emmène-moi direct à la case printemps,
loin des regrets abjects et des affres du temps.
La neige c'est de l'eau. Le vent c'est des pensées.
La flamme est un halo que je veux dépenser.
Avec toi je vivrai, toujours de port en port,
et mon corps délivré sera ton passeport.
Je pourrai tout brûler, sauf mon désir pour toi :
ce goût acidulé me brûlera à moi.
Nous trouverons de l'or et des îles à tribord.
Tes yeux seront alors mon seul journal de bord.
Nous irons convoler en terres enchantées.
Emmène-moi voler sur des landes hantées,
dans les sombres manoirs, les superbes palais.
Nous irons nous asseoir sur des bancs de galets.
Nous roulerons nos corps dans les herbes et les prés.
Et si tu es d'accord, mon paquetage est prêt.
Emmène-moi ailleurs, peu importe l'endroit,
au pire ou au meilleur, car mon ailleurs c'est toi.



Philippe LATGER
Décembre 2001 à Toulouse

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Une voix

Publié le

Ta voix au téléphone, résonne, et m'électrise,
et sur l'électrophone, faisait ses vocalises.
Je l'ai gardée au fond de mon oreille émue.
Elle s'enroule au plafond et, dans ma chambre, elle mue.
C'est dans mon vestibule qu'elle pose son manteau,
monte comme une bulle et heurte le marteau.
J'ouvre mon pavillon, tous mes conduits pimpants,
pour que le tourbillon balaye mes tympans.
Ta voix est invitée à mes soirées de bal.
Dans mon intimité, la trompe d'Hannibal.
Et dans celle d'Eustache, glisse ton doux phrasé,
puis se tend, se relâche, avant de s'écraser.
De ces microsillons jaillissait ta chaleur,
comme un grand papillon allant de fleur en fleur.
Ce vent sur tous les tons, entrait dans mon séjour.
Sopranes et barytons se répondent toujours.
Je me nourris aussi de nos conversations,
l'échange radouci des communications.
Jouissive sonnerie d'un appel attendu.
Je tremble et je souris, à l'appareil pendu.
Je sens sous ton profil, le souffle au combiné,
qui vibre au bout du fil qui m'a embobiné.
Je te sens dans mon poing, toi et tes dérivés.
Ta voix part de si loin pour au cœur arriver.
Elle a su se frayer un chemin souterrain
sous le disque rayé de mon âme d'airain.
Elle creusait un sentier, dégageait une voie
dans mon corps tout entier où elle se fourvoie.
Tes airs, à l'unisson, au-delà des déserts,
me donnent le frisson, font bouillir mes geysers.
Je percevais tes ondes, aux sirènes pareilles.
De l'autre bout du monde, me venaient aux oreilles
la clameur d'une horde, le cri de ton organe,
ton instrument à cordes, ou le violon tzigane
qui s'accorde à mon corps, aux orgues de mon dieu.
Ta voix dans mon décor met de la poudre aux yeux.
Je l'aime à la radio comme dans l'écouteur,
sur une bande audio, lecteur ou projecteur ...
mais c'est sur l'oreiller que je voudrais l'entendre
pour être émerveillé et avoir su l'attendre.



Philippe LATGER
Novembre 2001 à Toulouse

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Tu peux vieillir

Publié le

Tu perdras peut-être tous tes cheveux d'ange.

Sur la peau le spectre d'écorces d'oranges.

Gencives amollies, les mains tachées, séchées.

L'odeur de la folie. Souvenirs éméchés.

Et tu perdras ton souffle. Tu perdras la mémoire.

Pieds nus dans tes pantoufles, regretteras la moire

de ta peau d'autrefois, l'éclat de ton visage,

la force de ta foi et de tous tes mirages.

Alors tu douteras, videras tes tiroirs,

et tu te voûteras, haïssant les miroirs,

un soupir éperdu sur le passé volé,

la jeunesse perdue et l'issue dévoilée.

La nostalgie sanglée, accrochée à tes doigts,

un sanglot étranglé dans ton filet de voix,

tu fermeras les yeux sur ton corps étranger,

sur des remords odieux qu'il ne faut déranger.

Plus de cordes à ton arc, tu maudiras le temps.

Balades dans le parc à rêver du printemps.

Tu perdras des amis avec sérénité,

doubleras les paris sur leur éternité.

Tu seras fier de toi, du parcours achevé,

tu seras fier de moi, resté à ton chevet.

Car je serai présent, toujours à tes côtés,

à recompter les ans de nos vies ligotées.

Ne crois pas me lasser par la fatalité

pour te débarrasser de ma fidélité.

La vieillesse viendra pour dégrader ton corps,

mais blotti sous tes draps, je t'aimerai encor.

Tu me rejetteras, piqué par le dégoût,

ne m'ouvrant plus les bras, jetant tout à l'égout,

me conjurant de fuir, d'aller vivre ma vie,

tanner un autre cuir et changer de parvis.

Je ne comprendrai pas ton horreur de toi-même,

et restant sur tes pas, tu sauras que je t'aime.

Je me prosternerai, dans une révérence,

je t'exaspérerai par ma persévérance.

Et regardant tes mains, tu chercheras le lien.

Je serai ton chemin quand il n'y aura plus rien.

Tu ne comprendras pas ce qui m'attirera

dans ce vieux scélérat que tu mépriseras.

Mais j'espère savoir te refléter toujours

ce que mon cœur sait voir briller sous l'abat-jour.

Ta peau peut se flétrir et tes joues se creuser,

l'orgueil peut te pétrir et l'ennui te peser,

tu resteras pour moi le prince de mes nuits,

et j'ôterai d'un doigt le poids de tes ennuis,

le poids de tes années et le poids de tes doutes.

Tu seras condamné à me barrer la route.

Mon cœur ouvert au vent, je t'ouvrirai le ciel.

Je te rendrai vivant, vainqueur et immortel,

te donnerai mon sang et mon souffle amoureux,

le plaisir indécent d'un baiser langoureux.

Nous serons détestés, par tous du doigt montrés.

Le temps s'est arrêté quand je t'ai rencontré.

Contre la loi des heures, je suis entré en guerre.

La jeunesse est un leurre, une illusion vulgaire.

Je ris de nos frayeurs de voir nos corps vieillir.

Je sais qu'il y a des fleurs qu'il nous reste à cueillir.

Tu vas te lamenter sur les photos jaunies

célébrant ta beauté d'une époque honnie,

où ta force insultait le commun des mortels.

Ta lumière exultait de ton charme pluriel.

Tu avais du succès, et le monde à tes pieds.

Tu vivais de luxe et de fortune en papier,

tu tutoyais les anges, des langues dénouées,

drapé de leurs louanges, de bravos dévoués.

La gloire du passé, à ta fougue liée,

s'est lancée puis cassée sur tes rides pliées.

Pourquoi l'âge nier, sur cet affreux damier,

pour être le dernier de ces jeunes premiers ?

Tu es fort de ce don, de ce vécu fastueux.

Ajoute le pardon à ce que nous fait Dieu.

Tu sors en grand seigneur de ta magnificence,

avec tous les honneurs, notre reconnaissance.

Alors ne pleure pas sur ces jeunes années.

La vie a pris le pas. Nous sommes tous damnés.

Tu te noyais dans tes nabuchodonosors.

Ton masque de santé cachait ton vrai trésor.

Tu te perdais tout seul dans un flot d'illusions.

Ton image linceul voilait la profusion

de tant de grandeurs d'âme, de tes vraies qualités.

Quand sous ton aspartame dort un sucre fruité.

L'existence époussette ce traître de miroir,

le torrent de paillettes qui empêchaient de voir

une beauté profonde, tout ce que j'aime en toi.

Et que la glace fonde pour qu'enfin on te voie !

Tu peux vieillir mon cher, en souriant du passé !

Quant au goût de ta chair, je saurai l'embrasser.

Il gardera pour moi d'absolues voluptés.

Le monde peut rougir, nous blâmer, éructer.

J'aime l'enfant en toi et sa curiosité.

Garde-moi sous ton toit. Prends-moi sans hésiter.

Car pour tous ceux qui t'aiment, tu seras jeune et beau,

et puis, dans mes poèmes, un mythe à la Garbo.

Il y a sous cet acteur, un beau petit garçon,

et sous le séducteur, un ange à sa façon.

Au-delà de tes murs, il y a des yeux surpris.

C'est de cet esprit pur que je me suis épris.

L'amour tue le trépas et transcende le sang.

L'esprit ne vieillit pas. Le temps est impuissant.



Philippe LATGER
Novembre 2001 à Toulouse 

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